Sciences Economiques et Sociales Créteil

Les classes sociales ont-elles dissoutes par les socio-économistes dans les réseaux, les générations et la hiérarchie des revenus ?

14 / 09 / 2011 | Alia Chouaikhia

Journée du GDR ECONOMIE & SOCIOLOGIE

Les classes sociales ont-elles dissoutes par les socio-économistes dans les réseaux, les générations et la hiérarchie des revenus ?

12 octobre 2011, 48 bd Jourdan, Paris 14e, Grande salle, accès libre

Café d’accueil (8h45, Hall Grande salle)

 

Matinée :

Classement, nomenclature et hiérarchie

(9h30-12h30, Grande salle)

Animation : Florence Jany-Catrice

 

Intervenants :

Thomas Amossé, Luc Boltanski, Alain Chenu, Alain Desrosières, Etienne Pénissat

 

Déjeuner-buffet (sur place, fond de salle du Pot Jourdan)

 

Après-midi :

Classes, réseau, mobilité

(14h30-17h30, Grande salle)

Animation : Philippe Steiner

 

Intervenants :

Stéphane Beaud, François Dubet, Olivier Godechot, Emmanuel Lazega,

Frédéric Lebaron, André Orléan

 

Discussion conclusive

Animation : François Vatin

 

Cocktail de clôture 17h30 (Hall Grande salle)

 

 

Argument de la journée :

 

Le concept de « classe sociale » fut longtemps, dans la tradition marxiste mais pas seulement, au centre de l’analyse sociale des faits économiques. Or, les renouveaux théoriques récents en la matière semblent avoir conduit à l’abandon, ou, tout au moins, à la marginalisation de ce concept. En lieu et place, des critères nouveaux de classification comme les réseaux ou les générations sont de plus en plus fréquemment mobilisés.

Ainsi, une étude, désormais classique, du marché du travail des cadres a mis en évidence le rôle des réseaux familiaux et amicaux dans la recherche d’emploi. Cette approche a fait école, jusqu’à qualifier une nouvelle forme de « l’esprit du capitalisme ». L’approche réticulaire des marchés et des organisations occupe désormais une place importante chez les économistes et les sociologues économistes. De même, la notion de génération a été portée par le débat sur les retraites et, plus largement encore, par celui sur la protection des ressources non renouvelables. Les rapports sociaux sont alors saisis au travers des rapports des générations qui se succèdent et sont liés par le jeu de la « dette », financière ou écologique. Là encore, on peut dire que cette approche a fait école, jusqu’à fournir des grilles générales de lecture des sociétés, soit en termes de comptabilité inter générationnelle ou de « guerre générationnelle ».

Plus surprenant encore, notamment lorsqu’elle s’appuie, de manière empirique, sur des données quantifiées, l’étude des inégalités contourne souvent elle-même la notion de classes sociales, en se limitant à une approche en termes de hiérarchisation sur une échelle de revenus d’un ensemble salarial supposé continu. Les « hauts revenus » sont alors opposés à la « pauvreté » et le « profit » se dissout dans les bonus et les gratifications que perçoivent les salariés placés au sommet des hiérarchies organisationnelles des banques et des grandes firmes cotées en bourses.

L’étude socio-économique des marchés et des organisations a-t-elle ainsi dissout les classes sociales dans les réseaux, les générations et l’opposition entre riches et pauvres ? Les structures productives n’ont-elles plus la prééminence que leur avaient accordée les théoriciens de la société industrielle, de Saint-Simon à Marx ? La notion d’exploitation a-t-elle perdu toute pertinence ? Les classes et leurs luttes, ont-elles en conséquence disparu ? Les modes de consommation ne sont-ils plus, eux non plus, des marqueurs d’états socio-économiques, comme l’avaient conçu des auteurs qui vont de Veblen et Halbwachs à Bourdieu ?

Depuis vingt-cinq ans, l’économie institutionnaliste et la sociologie économique se sont considérablement développées, en France comme ailleurs dans le monde. De nombreux chantiers théoriques nouveaux ont été ouverts et maintes enquêtes sur des questions jusqu’alors peu étudiées ont été menées. Il ne s’agit pas ici d’en conduire la critique, mais d’examiner si, précisément, ces acquis de la recherche ne permettent pas de revenir de façon heuristique sur la notion de classe sociale, qui a été délaissée. L’enjeu est important pour nos disciplines, il l’est aussi concernant le rapport de nos disciplines à la société.